[A. S. - 12/8 858 an meinen Vater]
[…] qui ont été faites depuis 11 ans que je
suis à Victoria, en état de prospérité, & complétement achevée, sauf les
chemins de communication. Dans trois ans elle devra me raporter environ 4000
Arobas de café. Suivant le système des planteurs de café de Caravellas, qui s’en
sont tous bien trouvés, & qui consiste à planter des cafiers en masse sans
trop s’inquiéter si on a les moyens de les soigner (système qui abîme le pays
mais enrichit ceux qui le suivent) je compte abattre en Septembre de nouveau
autant de forêt que l’an passé. Je ne sais trop comment cela ira, mais je dis
comme Blücher : « Es
muß gehn » ; & ça ira. Ce
serait pourtant drôle que des planteurs de Caravellas, qui possèdent 30 ou 40
nègres de service puissent avoir des plantations du contenu de 300 à 400 mille
cafiers desquels ils cueuillissent 4 à 5000 Arrobes, & que moi qui ai plus
que le double de ces forces doive me contenter avec des plantations de 60 à 80
mille cafiers, qui me donnent à peine 1500 Arbs. – Il faut que cet état des
choses change complètement, & sans vouloir pousser aussi loin que les planteurs
de Caravellas la rage de planter, je veux pourtant arriver à un état d’aumoins 400
mille cafiers, qui, étant mieux soignés que ce n’est le cas à Caravellas
pourront me donner près de 6000 Arbs.
Mes esclaves prospèrent & augmentent,
preuve convaincante du bon traîtement dont ils jouissent, & qui, thèse
générale, commence à devenir trop bon par tout le Brésil ; à la suite de
la valeur considerable qu’a l’esclave aujourdhui. Cette phylantropie négrophyle
commence à dégénerer en faiblesse & crainte de la part des maîtres & en
insolence & insubordination de la part des esclaves. En effet, quel est l’individu
qui veut perdre de gaité de cœur une somme de 5 à 6000 francs représentée
par un esclave qui peut s’enfuir ou se suicider ; de là vient cette
condescendance prévenante dont la majeur partie des propriétaires usent vis-à-vis
de leurs esclaves & qui ne sert qu’à donner à ces derniers le sentiment de
leur prix, à leur monter la tête & les rendre tout à fait indomptables, au
point qu’ils ne connaissant plus ni frein ni loi, tandis que leur maîtres,
devenus proprement dit les esclaves de leurs esclaves, attendent chaque jour,
& attendront jusqu’au dernier jour les bons effets de leur procède, c. a.
d. le sentiment du devoir, la reconnaissance, l’amour du travail & de l’ordre
se manifestant chez les Nègres. Autant vaudrait aller chercher de la glace dans
le grand Sahara.
Quant à moi, qui n’ai point ces véléités phylantropiques,
je me contente de nourrir mes esclaves aussi copieusement & suculement qu’ils
le désirent, je les loge & les vêtis presque aussi bien que moi ; s’ils
sont malades, rien ne leur manque ; ils ont assez d’occasions & de
temps libre pour gagner de l’argent tant qu’ils en veulent ; ils
travaillent autant que cela se peut sans se fatiguer : Et pour tout cela
je n’exige que du respect, de la discipline & de l’obéissance, & celui
qui m’en manquerait je serais capable de l’attacher à un arbre & fusiller
de ma propre main : en advienne ce qui voudra. – Le fait est que les nègres
sont la plus abominable engeance qui existe, & que celui qui est obligé de
vivre avec eux est soumis à une rude épreuve. Il n’y a guère que les Portugais
qui sachent les mener comme cela doit être ; les autres Européens &
les Brésiliens ne s’y entendent pas.
Ma famille, qui se porte à merveille quant au
physique, vient de s’augmenter encore d’un rejeton du sexe feminin ; c’est
une petite calamité, mais qui faire ? J’ai donc cinq enfans dont l’ainée a
6 ans seulement. Il faut commencer à s’occuper de l’éducation des deux ainés,
prendre un précepteur ou quelque chose de semblable afin de les surveiller
& de leur donner les premières instructions ; vu qu’ils ne sont plus d’age
à rester avec les négresses, avec lesquelles, au surplus, ils n’apprennent rien
de bon. Ce sera une dépense de plus, mais je ne puis pourtant pas laisser
grandir mes enfans comme de petits sauvages & quant à ma femme & moi
nous somme trop occupés les journées pour pouvoir nous occuper de soins
pädagogiques, & la nuit n’est pas propre à l’enseignement d’enfans en bas
àge. Si mes enfans sont aussi intelligens que forts & robustes ils ne
laisseront rien à désirer ; ma petite monte déjà à cheval sur une selle
sans dossier ni appui & fait deux lieues au petit galop sans se fatiguer. L’équitation,
qui en Europe n’es qu’un luxe, est indispensable dans ce pays, où on n’a d’autre
moyen de locomotion, à moins de marcher au pieds, le pantalon on la jupe
retroussée jusqu’au dessus du genou pour pouvoir traverser les torrens, les
mares d’eau & les marais qu’on rencontre à chaque pas sur son chemin.
Somme totale je puis dire que je suis heureux
& content de mon sort, (…) dans le cas de dire que je ne saurais plus rien
désirer, si ce n’est de revoir encore une fois tous (…)
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